Paul MATTEI | In memoriam Aimé Gabillon (1922-2010) | I-II |
Martine DULAEY | La geste de Moïse dans l’œuvre d’Augustin (1) | 1-43 |
Mark DELCOGLIANO | Basil of Caesarea on the Primacy of the Name ‘Son’ | 45-69 |
Gilbert DAHAN | « Deux peuples en un Corps ». Commentaires médiévaux d’Éphésiens 2, 14-18 | 71-88 |
Adina PELEANU | Deux séries chrysostomiennes : Sur l’impuissance du diable et Sur l’obscurité des prophéties | 89-108 |
Sylvio Hermann DE FRANCESCHI | Augustinisme et science moyenne | 109-135 |
Wolfgang HÜBNER | E pluribus unum bei Augustin | 137-144 |
Comptes rendus bibliographiques | 145-187 |
57/2
Philippe HOFFMANN | Pierre Hadot (1922-2010) | III-XII |
Martine DULAEY | La geste de Moïse dans l’œuvre d’Augustin (2) | 189-237 |
Jérôme LAGOUANÈRE | La notion de prochain dans les premiers écrits d’Augustin. Esquisse de réflexion | 239-267 |
Anne-Isabelle BOUTON-TOUBOULIC | Le cercle et la droite, figures de la Consolation de Philosophie de Boèce | 269-285 |
Sophie VAN DER MEEREN | L’influence du protreptique à la philosophie sur la Consolatio de Boèce : réexamen de la question | 287-323 |
Pierre MOLINIÉ | La confession de foi inaugurale dans la Lettre 12 de Maxime le Confesseur | 325-356 |
Lukas J. DORFBAUER | Ein neuer Textzeuge des wisigotischen Genesiskommentars Intexuimus : Exzerpte im Codex Monte Cassino, Bibl. Abb. 187 | 357-369 |
Philippe VERKERK | Critique d’attribution et analyse quantitative | 371-374 |
Chronica Tertullianea et Cyprianea 2010 | 375-427 | |
Bulletin augustinien pour 2010/2011 et compléments d’années antérieures | 429-491 | |
Auteurs des travaux recensés | 493-499 | |
Table générale | 501-502 |
Résumés :
Martine DULAEY, « La geste de Moïse dans l’œuvre d’Augustin (1) », p. 1-43
Augustin n’a pas écrit de commentaire de l’Exode, mais, avec une grande efficacité et des trouvailles pédagogiques, ses homélies exposent aux fidèles sa signification spirituelle. Ce premier article va de la naissance de Moïse aux combats dans le désert. En comparant les propos de l’évêque d’Hippone à ceux de ses prédécesseurs, il entend mettre en lumière à la fois sa dette (car sur plus d’un point il retravaille des traditions anciennes) et son apport personnel.
Mark DELCOGLIANO, « Basil of Caesarea on the Primacy of the Name ‘Son’ », p. 45-69
Cet article étudie les raisons avancées par Basile de Césarée pour refuser les dénominations traditionnelles du Fils préférées par son adversaire Eunome : « engendré » (γέννημα), « (être) ayant été fabriqué » (ποίημα), et « créature » (κτίσμα), de même que les raisons avancées en faveur du nom qu’il préfère : « Fils » (υἱός). Dans le but de contextualiser ces noms, on se livre ici à une enquête sur l’utilisation antérieure, durant le IVe siècle, des noms préférés par Eunome, et sur les opinions qui lui sont relatives. Nous montrons alors que l’approche de Basile est ancrée dans la tradition, en même temps qu’innovatrice. Alors que, dans ses critiques du nom de « créature », il s’appuie sur Eusèbe de Césarée, lorsqu’il prend position contre le terme d’« engendré » ou (être) « ayant été fabriqué », Basile fait valoir que ces noms contreviennent à l’usage scripturaire et ne peuvent même pas être inférés en s’appuyant sur les passages de l’Écriture, en raison des exigences liées au texte scripturaire. Il s’oppose ainsi à une longue tradition qui avait préconisé ces emprunts. Il se sert des catégories techniques grammaticales pour délimiter la tâche de l’exégète, qu’il considère devoir se limiter aux mots explicitement utilisés dans l’Écriture. Ainsi, dans son argumentation relative aux noms, Basile nous en révèle autant sur sa compréhension de ce que doivent être les principes corrects de l’exégèse scripturaire que sur l’interprétation concrète de passages spécifiques.
Gilbert DAHAN, « Deux peuples en un Corps ». Commentaires médiévaux d’Éphésiens 2, 14-18, p. 71-88
À travers l’exégèse de quelques versets de l’épître aux éphésiens, cette étude vise à montrer le travail concret des commentateurs occidentaux, des Pères latins à la fin du XIIIe siècle, tant dans leurs méthodes que dans leurs options doctrinales. Tout en se fondant sur les commentaires patristiques (notamment celui de l’Ambrosiaster), les exégètes médiévaux renouvellent en profondeur la compréhension du texte, qu’il s’agisse d’auteurs du haut moyen âge, comme Hatto de Verceil et Haymon d’Auxerre, ou de ceux des XIIe et XIIIe siècles, parmi lesquels Hugues de Saint-Cher, Guerric de Saint-Quentin, Thomas d’Aquin, Pierre de Tarentaise et Nicolas de Gorran. Sont particulièrement étudiés les thèmes des deux peuples et de la paix ainsi que la christologie. Sur le plan de la méthode, on insiste sur les questions de critique textuelle et sur la procédure de la divisio textus.
Adina PELEANU, Deux séries chrysostomiennes : Sur l’impuissance du diable et Sur l’obscurité des prophéties, p. 89-108
Depuis l’édition de B. de Montfaucon (1718), l’ensemble des spécialistes chrysostomiens a considéré les homélies De diabolo tentatore (CPG 4332) comme une série homogène de trois discours. Une étude approfondie des textes, ainsi que l’examen de la tradition manuscrite et du Catalogue Augustanus nous ont amenée à réenvisager la constitution de la série De diabolo tentatore, que nous avons dénommée Sur l’impuissance du diable. Ainsi, la première homélie de la série Sur l’impuissance du diable trouve sa place comme troisième de la série Sur l’obscurité des prophéties (CPG 4420). Les deux séries rétablies sont bien définies et délimitées, tant du point de vue thématique que du point de vue chronologique. Le problème qui demeure est de pouvoir établir si les deux séries ont été prononcées à des dates très rapprochées. La série Sur l’obscurité des prophéties aurait pu être prononcée pendant le Grand Carême de l’année 386, au tout début de la prêtrise de Jean Chrysostome. Il est certain que les deux homélies Sur l’impuissance du diable ont été prononcées à Antioche, pendant la semaine pascale, du temps de l’évêque Flavien. Nous n’avons pas d’indice sûr en ce qui concerne la date de prédication. Puisque aucun manuscrit ne présente la suite des cinq homélies, cela a constitué pour nous un indice fort pour soutenir l’hypothèse que les deux groupes auraient été prononcés à des dates différentes, et qu’il s’agirait bien de deux séries distinctes.
Sylvio Hermann DE FRANCESCHI, Augustinisme et science moyenne, p. 109-135
Depuis le temps des Congrégations de auxiliis (1598-1607), deux factions s’affrontaient parmi les théologiens catholiques : d’un côté, les jésuites, qui défendaient la thèse moliniste d’une grâce suffisante conférée à chacun et rendue efficace par le simple consentement du libre arbitre ; de l’autre, les dominicains, défenseurs d’un strict thomisme, qui accusaient leurs adversaires de semipélagianisme et maintenaient le principe d’une grâce efficace par elle-même nécessaire en plus du secours procuré par la grâce suffisante. Les thomistes prétendaient respecter à la lettre les enseignements de saint Augustin. Le présent article essaie de montrer comment les Salmanticenses, dont le Cursus theologicus a été la plus parfaite expression de la théologie thomiste sur la grâce et le libre arbitre, et surtout le P. Antonio de la Madre de Dios (1583-1637) ont défendu des positions inébranlablement augustiniennes contre les thèses molinistes sur la question des futurs contingents.
Wolfgang HÜBNER, E pluribus unum bei Augustin, p. 137-144
On a, à juste titre, associé la formule E pluribus unum à saint Augustin, qui l’apprécie pour son caractère contradictoire en l’employant dans différents contextes. Il est vrai que l’on pense de prime abord aux Confessions. Mais dans cette œuvre célèbre, l’expression se réfère à une amitié érotique de la jeunesse, tandis qu’un sens plus profond se révèle dans sa pensée philosophique (sens esthétique et numérologique) et théologique (sens ecclésiologique et christologique), dans les Enarrationes in psalmos, d’après la langue des Psaumes, et mieux encore dans le De trinitate, d’après l’évangile de Jean.
Martine DULAEY, « La geste de Moïse dans l’œuvre d’Augustin (2) », p. 189-237
Ce second article suit l’exégèse augustinienne de l’histoire de Moïse au désert depuis les eaux amères de Mara jusqu’à l’ultime théophanie du Sinaï. L’évêque d’Hippone, que le culte de la personnalité indispose, se garde d’exalter excessivement le guide d’Israël, qui demeure à ses yeux un homme pécheur. Mais en brossant le portrait de Moïse, mystique et chef énergique du peuple avec lequel il est en tout solidaire, Augustin trace celui de l’évêque idéal.
Jérôme LAGOUANÈRE, « La notion de prochain dans les premiers écrits d’Augustin. Esquisse de réflexion », p. 239-267
La notion de prochain chez Augustin a été peu étudiée par la critique, bien qu’elle joue un rôle important dans sa pensée. Le présent article tente d’étudier la manière et les motivations qui ont amené Augustin à évoluer sur le sujet, par un examen d’abord de sa première formulation du concept dans le De moribus ecclesiae catholicae, puis de son interprétation ultérieure de la parabole du bon Samaritain. Il appert ainsi que sa définition du prochain a connu une profonde évolution, d’une formulation influencée par le concept païen de iustitia, à une formulation christologique où se lit l’influence de l’exégèse d’Ambroise et surtout d’Origène.
Anne-Isabelle BOUTON-TOUBOULIC, « Le cercle et la droite, figures de la Consolation de Philosophie de Boèce », p. 269-285
S’appuyant sur l’intérêt de Boèce pour la géométrie, cet article vise à explorer la présence multiple des figures du cercle et de la droite dans la Consolation de Philosophie. L’étude de ces figures permet de retracer comment l’on passe, au sein du texte, de représentations dégradées du cercle et de la droite à des figures géométriques de plus en plus épurées – de la roue de la Fortune aux cercles dont la Providence est le centre, dans un processus où l’exégèse néoplatonicienne du Timée joue un grand rôle. Ce parcours correspond au progrès que le prisonnier Boèce accomplit sous la direction de la Philosophie ; mais ces figures renvoient aussi à l’art du discours dialectique employé par cette dernière, qui alterne enchaînements linéaires et circulaires des raisonnements.
Sophie VAN DER MEEREN, « L’influence du protreptique à la philosophie sur la Consolatio de Boèce : réexamen de la question », p. 287-323
Nous rouvrons ici le « dossier » déjà ancien des rapprochements entre la Consolatio et le « genre » du protreptique à la philosophie. Les premiers rapprochements remontent à la fin du XIXe s., dans le cadre des recherches menées sur le Protreptique d’Aristote, à la suite de la « découverte » supposée de longs fragments de celui-ci chez Jamblique. Plusieurs spécialistes ont alors recherché dans le texte de Boèce des échos du Protreptique d’Aristote ou d’autres exhortations à la philosophie. Très utiles pour éclairer les sources de Boèce, ces études ont surtout mis en évidence une série de topoi philosophiques. Sans négliger ceux-ci, nous proposons une approche fondée sur la rhétorique des genres, qui nous conduit à confronter l’exhortation et la consolation en tant que discours. Si les deux types de discours partagent une intention pragmatique et éthique, le discours consolatoire s’en tient à des conseils dispersés. La Consolatio de Boèce, en revanche, se rapproche des protreptiques par l’importance donnée à la finalité de l’être humain – le bonheur. Elle substitue, d’autre part, au ton fataliste des consolations un programme systématique permettant à l’homme d’accéder à cette finalité, grâce à l’accomplissement de sa nature.
Pierre MOLINIÉ, « La confession de foi inaugurale dans la Lettre 12 de Maxime le Confesseur », p. 325-356
Dans sa Lettre 12, Maxime le Confesseur réfute le monophysisme de Sévère d’Antioche, en développant sa conception de l’hypostase composée du Christ. Celle-ci constitue un paradoxe pour la raison : elle respecte l’intégrité des natures humaine et divine, pour préserver l’harmonie du cosmos à laquelle le moine byzantin est si attaché ; elle marque aussi la supériorité absolue du Christ, qui dépasse tout ce que l’on pourrait dire de la divinité, dans un amour pour les hommes qui déborde toute catégorie métaphysique et apporte à l’univers une nouveauté radicale. La notion biblique de médiation se trouve alors reprise dans la perspective de l’union hypostatique : ce qu’il y a de plus charnel dans l’homme est touché par la grâce de l’Incarnation, et la nature humaine tout entière est divinisée.
Lukas J. DORFBAUER, « Ein neuer Textzeuge des wisigotischen Genesiskommentars Intexuimus : Exzerpte im Codex Monte Cassino, Bibl. Abb. 187 », p. 357-369
Le florilège Item questionem veteris testamenti transmis dans le manuscrit Monte Cassino, Bibl. Abb. 187 (s. IX2) contient quelques extraits, jusqu’à présent ignorés, d’un commentaire espagnol sur la Genèse du haut Moyen-Âge, connu sous le nom d’Intexuimus. Dans cet article, les extraits sont transcrits et leur relation aux autres témoins connus de l’Intexuimus est discutée. L’étude des textes qui sont transmis dans Monte Cassino, Bibl. Abb. 187 montre que, dans le scriptorium où ce manuscrit a été écrit, on a eu accès à quelques œuvres espagnoles du haut Moyen-Âge dont certaines très rares ; il se peut qu’un ancêtre de Monte Cassino, Bibl. Abb. 187 ait été rédigé en écriture visigothique.